Odile HUBLER l'assistante sociale assassinée à Mulhouse en 1971

 

Par Jean MARTIN 

 

 


Ses ancêtres HUBLER à Levoncourt.

 

 

Pierre HUBLER né vers 1699, décédé le 10 avril 1788 est procureur fiscal, maire de la baronnie de Morimont succédant à son père Mathis Hubler décédé en 1739.

Avec son épouse Marie Ursule MAREZ (1693-1780), ils ont 7 enfants dont Conrad HUBLER né en 1734, décédé le 14 août 1809 qui sera aubergiste et que l'on retrouve à Valence dans la Drôme pendant une vingtaine d'années. Il s'y marie le 6 mars 1774 avec Marthe METIFIOT née vers 1750 décédée le 19 janvier 1831. Ils y ont 6 enfants avant que toute la famille ne revienne à Levoncourt où ils ont eu encore un enfant en 1794. Parmi eux Jacques HUBLER né le 25 février 1784, décédé le 9 janvier 1844, est également aubergiste, mais aussi douanier et cultivateur. Il se marie le 3 mai 1808 à Levoncourt avec Anne-Marie HOUG (1789-1847) de Levoncourt, avec qui il a eu 8 enfants entre 1810 et 1829 dont Jaques HUBLER né le 8 juillet 1810 à Kembs où son père est douanier. Il se marie à Levoncourt le 21 janvier 1835 avec Madeleine LINDER née le 6 mars 1812 à Linsdorf, décédée le 19 novembre 1885 à Levoncourt.

Ils ont 11 enfants entre 1836 et 1856, parmi eux Joseph HUBLER le grand-père de l'assistante sociale.

 

 

Ses ancêtres HOUG à Levoncourt.

 


Anne-Marie HOUG née vers 1789, décédée le 28 avril 1847 épouse de Jaques HUBLER (dont nous avons parlé dans le précédent paragraphe), est fille de Mathias HOUG tailleur d'habits, né vers 1751, décédé le 28 novembre 1821, marié religieusement à Mariastein, lieu de pèlerinage en Suisse, tout proche de la frontière, le 17 mai 1785 avec Marie-Anne PETIGNAT née le 16 septembre 1761 à Pleujouse (Suisse) décédée le 19 juillet 1790 à Levoncourt.

Le père de Mathias, Antoine HOUG fils de Joseph et Madeleine SCHMITT est né vers 1721, décédé le 7 janvier 1773, a épousé le 8 février 1749 à Levoncourt Anne Marie DARD née vers 1719, décédée le 10 janvier 1789, fille du recteur d'école de Levoncourt Jean-Baptiste DARD (1680-1742) et de Marie PFOSCHT.

 

 

 

Joseph HUBLER le grand-père, instituteur.
Joseph HUBLER le grand-père, instituteur.

Ses grands-parents.

 

 

Joseph HUBLER fils de Jaques HUBLER et de Madeleine LINDER est né le 18 décembre 1851 à Levoncourt. Dernier garçon de la fratrie des onze enfants, il deviendra instituteur. Il se marie le 12 septembre 1882 à Rombach le Franc avec Marie-Elisabeth CONRAUX fille de Nicolas CONRAUX maire de Rombach et de Margueritte COLLIN. Ils auront six enfants tous nés à Rombach entre 1883 et 1893:

-Marguerite née le7 octobre 1883, décédée le 5 juin 1961

-Louis Joseph né et décédé le 23 avril 1885

-Joseph né le 30 avril 1886, décédé le 10 octobre 1954 

-Louis Célestin né le 14 décembre 1888, décédé le 14 novembre 1966

-Marie-Madeleine née le 13 novembre 1889, décédée le 25 novembre 1985

-Adèle- Hortense née le 21 janvier 1893, décédée le 1 août 1972.

 

Joseph HUBLER le grand-père est décédé le 13 août 1929 et son épouse Elisabeth CONRAUX le 3 avril 1931, les deux à Sainte Marie aux Mines.

 

 

 

Ses parents.

 

 

Louis Célestin HUBLER (1888-1966) fréquente l'école polytechnique de Zurich où il devient ingénieur. Il est décoré de la croix de guerre 1914-18. Il s'installe dans le nord après 1914 pour y exercer son métier. Il se marie le 25 septembre 1920 à Nancy avec Hélène MENSIER née le 24 juin 1888 à Nancy, fille d'Adolphe Henri MENSIER et de Louise Elisabeth BONNET. Ils ont 4 enfants qui naissent à Lille :

-Michel (1921-1945)

-Jean (1923-1989)

-Odile (1925-1971)

-Hélène (1927)

La famille revient en Alsace en 1933, puis se réfugie Toulouse au début de la guerre.

Après la guerre, la famille vient s'installer à Mulhouse où Louis Célestin dirige à la Société Alsacienne de Construction Mécanique, le service des compresseurs et des pompes.

 

 

Odile HUBLER 1950
Odile HUBLER 1950

Sa scolarité.

 

 

Odile née le 22 juin 1925 fréquente l'école primaire et elle passe son Baccalauréat de Philosophie à Toulouse.

A son retour en Alsace elle travaille dans les centres sociaux de Wittelsheim et de Cernay, avant de poursuivre ses études d'assistante sociale à Paris.

Elle revient à Mulhouse en 1951 et est embauchée au centre Papin.

 

 

 

 

 

Odile HUBLER Mulhouse mai 1962 Fête de l'entraide par les jeunes
Odile HUBLER Mulhouse mai 1962 Fête de l'entraide par les jeunes

Ses convictions, sa personnalité, son apostolat.

 

 

A partir de ce moment là, elle œuvre sans relâche, avec un dévouement total, un souci majeur de justice et de vérité, une foi inébranlable, sur de nombreux sujets: entraide pour les jeunes, association populaire familiale, abbé Pierre, aide aux sans logis, aux travailleurs méditerranéens, aux femmes seules, association des familles d'accueil, accueil des asociaux, des alcooliques, des squatters et soutient les objecteurs de conscience. A son domicile et où elle peut, il y a toujours une grosse soupe, un lit pour dormir. Au fur et à mesure de ses actions elle devient "agitatrice non violente", opposée à l'ordre établi. Elle milite contre la peine de mort, contre l'armement atomique, contre la guerre d'Algérie, du Viet Nam, contre le commerce des armes, contre les atteintes à l'environnement.

Elle prend part à de très nombreuses manifestations pacifiques en restant simple, disponible, désintéressée, fraternelle.

Son ouverture d'esprit, son imagination créatrice, sa ferveur de sa foi chrétienne, son sourire, sa fermeté sereine, son courage, son abnégation, son dévouement, son désintéressement imposaient le respect.

 

 

 

Son assassinat.

 

 

Dans l'esprit décrit ci-dessus et fidèle à ses convictions, la porte de son appartement était toujours ouverte. Et le 12 janvier 1971 après 3 heures du matin un individu nommé Ben El Hadj, qu’elle connaît bien pour l'avoir déjà souvent aidé et soutenu dans des moments difficiles depuis plusieurs années, lui demande de l'argent, mais cette fois elle refuse et propose de simplement lui donner à manger.

Elle va donc dans sa cuisine pour préparer le repas. Pendant ce temps l'individu reste dans la salle à manger, fouille le sac d'Odile HUBLER pour trouver son porte monnaie et y dérobe son contenu. C'est là qu’elle le surprit. Elle se précipite sur lui, affolé Ben El Hadj la saisit à la gorge et serre de longues minutes le cou de la victime avant de laisser le corps sans vie sur le plancher.

Il transporte ensuite le corps sur le lit et se livre à une grossière mise en scène pour cacher les marques violacées qui marbrent le cou. Il s'empare d'une chemise de nuit, lui entoure le cou et fait un nœud très serré.

Puis froidement il quitte l'appartement en emportant les 180 F du porte monnaie et les clés du centre social qu'il ira également cambrioler pour un butin de 15 F.

Elle avait 45 ans.

 

 

Son assassin.

 

 

Ernest Marie Ben El Hadj, 22 ans, enfance malheureuse, n’a pas de profession bien définie. Né à Noël en 1948 à Soultz d'un père Algérien, jardinier aux mines de potasse et d'une mère aux mœurs légères qui quitte le foyer conjugal en laissant 7 enfants sur les 13 qu'elle a eu, à un père d'une grande brutalité. A 10 ans il se réfugie chez son frère aîné qui le fait placer dans un centre d'observation, puis une école spécialisée, puis chez un agriculteur qu'il quitte pour venir habiter chez sa sœur qui lui extorque son salaire, avant de le chasser.

On le trouve en mars 1967 au tribunal pour enfants et en mars 1968 devant la cour d'Assises pour incendie par dépit amoureux.

Trois ans de prison sont effectués et le 16 septembre 1970 il revient à Mulhouse où l'attend à la gare Odile HUBLER qui avait correspondu avec lui pour le soutenir.

Il est placé dans un centre de réinsertion, le 7 janvier il achète de l'essence avec laquelle il veut s'immoler. Il prend un taxi, agresse le chauffeur, couteau à la main, le déleste de 293 F.

Pendant quatre jours il erre en Suisse, en Alsace et il a besoin d'argent.

Nous sommes le 12 janvier 1971 après 3 heures du matin… Il va aller voir l'assistante sociale….

 

 

 

Ses obsèques.

 

 

C'est en l'église Ste Jeanne d'Arc de Mulhouse, devant 1500 personnes, que furent célébrées ses obsèques par six prêtres. Son cercueil recouvert de gerbes de roses rouges fut porté jusqu'aux marches de l'autel. Il a été fait part du télégramme que l'évêque Mgr. Elchinger avait envoyé pour la circonstance.

On passe la voix d'Odile sur un magnétophone. Elle disait « les cas les plus pauvres s'arrangent le plus difficilement…. »

L'inhumation eut lieu au cimetière de Rombach le Franc.

 

Le procès de son assassin.

 

 

Fin septembre 1971, devant la cour d'Assises du Haut-Rhin à Colmar s'ouvre le procès.

On y apprend qu'à l'école de Staffelfelden Ben El Hadj fournissait un travail en dessous de ses capacités, qu'il est resté traumatisé par le souvenir d'une jeunesse passée au sein d'une famille abandonnée par la mère et terrorisée par le père. Il devient donc prématurément indépendant, il est égoïste, dissimulé, agressif, exigeant pour ceux qui lui témoignent quelque affection. A 16 ans il est cité devant le juge pour enfants pour avoir abusé d'une mineure. C'est à cette époque qu'il fait la connaissance d'Odile HUBLER, qui ne cessera plus de l'aider et de lui témoigner sa sollicitude, malgré l'incendie volontaire qui renvoie Ben El Hadj devant la cour d'Assises qui le condamne pour 3 ans.

A la demande du Président de la cour de décrire les circonstances du meurtre il se souvient juste lui avoir mis les mains autour du cou et serré. Tout le reste il n'en sait plus rien, il a tout oublié !

Le psychiatre parle de troubles caractériels, de névroses obsessionnelles, de réactions paroxysmiques et d’une impulsivité mal contrôlée.

Trois témoins disent que Mlle HUBLER avait fait don de sa vie aux déshérités, qu'elle avait engagé la lutte pour la dignité humaine et qu'elle possédait un sens très aigu de la justice. Pour l'accusation Ben El Hadj est un criminel invétéré, violent, présomptueux, agressif.

L'avocat général, en raison du jeune âge de l'accusé et de certaines circonstances atténuant sa responsabilité, renonce à requérir la peine de mort, mais demande la prison à vie.

Après un rapide délibéré, les jurés le condamnent à perpétuité.

 

 

 

Le Square Odile HUBLER.

 


« On n’oublie pas Odile HUBLER quand on l’a croisée, même une seule fois. Son sourire, sa façon de vous regarder donnaient l’impression que vous étiez pendant cet échange, la personne la plus importante au monde…. ». Depuis longtemps déjà, ses compagnons de militantisme souhaitaient que la ville de Mulhouse rende hommage à cette femme exceptionnelle disparue prématurément.

 

Le 29 septembre 2007, au quartier Drouot à Mulhouse est inauguré le parc Odile HUBLER en l'hommage à l'ancienne Directrice du Centre Social Wagner.

Ouvert depuis mai 2006, ce parc clôturé de près de 7 ares, situé à deux pas de la nouvelle bibliothèque le cercle Drouot, est accessible par les rue de Provence et Staedelin. Il est un petit havre de tranquillité au cœur de la ville, ancré à l’intérieur de l’ancienne caserne Drouot réaménagée depuis le départ des militaires. Il comporte une large pelouse centrale, de nombreux arbres et plantes, un terrain de pétanque, des bancs en bois, une zone naturelle où la nature s’y développe comme elle veut.

 

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